Rencontre entre Katia Kameli et Marie-José Mondzain modérée par Vanessa Brito
Samedi 18 septembre 2021 — 16:00 FR / 15:00 PT
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Réservation conseillée.
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© Katia Kameli, ADAGP, Paris, 2020.
Le Roman algérien est le titre d’une trilogie de films que l’artiste Katia Kameli présente sous forme d’une installation inédite au plateau 1 du Frac. La découverte d’un kiosque au centre d’Alger, où sont vendues affiches et cartes postales qui retracent l’histoire récente du pays, pose une énigme à déchiffrer : qu’est-ce qui explique l’attrait pour cette imagerie ? Comment contribue-t-elle à la construction d’un imaginaire collectif, à l’écriture d’un roman national ? Katia Kameli mène son enquête à partir de différentes sortes d’images : images officielles, diffusées par la presse et le pouvoir colonial, images manquantes, images créées par des militant.e.s qui ont pris part aux luttes pour l’indépendance et l’émancipation. Elle donne la parole aux femmes qui les ont produites, qui les racontent et les commentent, en mettant en lumière ce que le roman national avait omis ou relégué à l’arrière-plan : leur statut d’autrices, d’actrices de la révolution, de penseurs de l’histoire politique et sociale dans laquelle elles ont été impliquées.
La philosophe des images Marie-José Mondzain y joue un rôle important. Filmée dans une salle de cinéma à Paris, elle assiste à la projection du premier film dont elle nous offre une relecture. Puis analyse et commente, assise à sa table de travail, des séquences laissées de côté lors du montage. Dans le troisième film, elle accepte de passer de l’autre côté de l’image : elle retourne à Alger sur les traces de son histoire familiale mais se retrouve rattrapée par le présent, où la marche du Hirak l’entraîne parmi la foule.
Cette table ronde sera l’occasion de revenir sur sa rencontre avec Katia Kameli, sur le tournage de ces trois films et les questions qui les traversent. Comment raconter l’histoire de ce dont on n’a pas de traces ? Comment transformer des images et documents hérités en savoirs vivants ? Qu’est-ce qui mène à la constitution d’une archive « sauvage » qui s’invente depuis les besoins du présent, à partir d’un corpus qui n’est pas institutionnel ? La discussion portera également sur la forme que prend cette enquête filmique et la temporalité spécifique qu’elle construit. En entremêlant récit personnel et histoire collective, luttes anciennes et actuelles, images d’archives et relectures contemporaines, sa trame narrative vient remettre en question le partage entre ce qui est passé et ce qui demeure présent. Ce tissage induit une temporalité inversée et non linéaire, dans laquelle les images et les personnages du film ne cessent de revenir à l’écran et de différer d’eux-mêmes, évoluant dans un mouvement de rétroactivité qui semble donner à ce roman l’allure d’un roman d’apprentissage.
Vanessa Brito, professeure de philosophie à l’École des beaux-arts de Marseille
« Marie-José Mondzain, je l’ai rencontrée après une projection de film, j’avais très envie de travailler avec elle, et je ne savais pas comment l’aborder. C’est une philosophe que j’avais lu, dont je connaissais la pensée, et qui avait nourri mon travail. Lorsque je l’ai rencontrée, elle m’a expliqué qu’elle avait prévu d’aller voir l’exposition au Mucem. Je lui ai dit que cela me ferait plaisir si elle trouvait le temps de m’en faire un retour, ce qu’elle a fait. C’est là qu’a commencé notre conversation. L’idée est venue alors très vite, dès que j’ai compris que mon dispositif l’intéressait et qu’il pourrait y avoir un chapitre 2 avec elle. L’idée de la salle de cinéma est apparue, la manière dont je pouvais capter son regard, j’ai réfléchi avec mon équipe au dispositif que j’allais mettre en place pour faire comprendre, à l’image, son rôle de philosophe des images. » (Katia Kameli)